lundi 24 mai 2010

La grammaire est une chanson douce, d'Eric Orsenna

Elle était là, immobile sur le lit, la petite phrase bien connue, trop connue ; Je t’aime. Trois mots maigres et pâles, si pâles. Les sept lettres ressortaient à peine sur la blancheur des draps. Il me sembla qu’elle nous souriait, la petite phrase.

Il me sembla qu’elle nous parlait :

- Je suis un peu fatiguée. Il paraît que j’ai trop travaillé. Il faut que je me repose.

- Allons, allons, Je t’aime, lui répondit Monsieur Henri, je te connais. Depuis le temps que tu existes. Tu es solide. Quelques jours de repos et tu seras sur pied.

Monsieur Henri était aussi bouleversé que moi.

Tout le monde dit et répète « Je t’aime ». Il faut faire attention aux mots. Ne pas les répéter à tout bout de champ. Ni les employer à tort et à travers, les uns pour les autres, en racontant des mensonges. Autrement les mots s’usent. Et parfois, il est trop tard pour les sauver.

Monsieur Orsenna est un grand Monsieur. Beaucoup le savaient et le savent. Encore, la semaine dernière, moi je ne le savais pas. Je m’en doutais bien, après avoir lu la quatrième de couverture de ce livre. Mais je me méfiais. Après tout, des grands pontes de la langue française avaient dit que c’était un grand monsieur, et moi ça avait tendance à me faire croire que monsieur était tellement grand qu’il ne regardait plus en bas. Mais je viens de comprendre que Monsieur Orsenna a beau être dans les hauteurs, il n’a jamais quitté la terre ferme. Ce qui le rend encore plus grand.

Enfin tout ça pour dire que ce livre est une petite merveille. C’est un très joli conte qui vous rappelle la beauté de notre langue. C’est un conte en effet, car c’est l’histoire de deux enfants qui s’échouent sur une île après une tempête tellement forte, qu’elle a vidée leur tête de tous les mots. Mais ils ont de la chance ces deux enfants car ils sont tombés sur une île un peu particulière qui va leur permettre de retrouver leurs mots. Et tout ça, grâce à l’aide de Monsieur Henri et de son sublime neveu.

C’est un conte plein de douceur, de musique et de poésie qui nous réapprend à traiter les mots avec égard et respect. Et qui donne envie de ne plus écharper la grammaire. De prendre soin des mots et de se réjouir de les avoir. Cette histoire loue la langue française mais avec simplicité et considération. Cette histoire est comme un rayon de soleil de fin d’après-midi, qui réchauffe sans brûler et qui peint le ciel en mille couleurs.

Comme vous pouvez le voir, j’ai été conquise par l’écriture de Monsieur Orsenna. Et je compte bien lire ses autres œuvres.

Oui, Monsieur Orsenna est un grand Monsieur.

2 commentaires:

100choses a dit…

Tout comme toi j'ai été littéralement enchantée par ce conte!

Pauline a dit…

Ma première lecture de cet auteur sera "L'entreprise des Indes"! ton avis positif me dit que ça va me plaire. J'avais hâte de savoir ce qu'il écrivait.