samedi 25 septembre 2010

Jane Eyre, de Charlotte Brontë


Jane Eyre est pauvre, orpheline, pas très jolie. Pourtant grâce à sa seule force de caractère, et sans faillir à ses principes, elle parviendra à faire sa place dans la société rigide de l'Angleterre victorienne et à trouver l'amour ...
Une héroïne qui surmonte les épreuves sans perdre foi en son avenir, une intrigue où se succèdent mystères et coups de théâtre, une passion amoureuse qui défie tous les obstacles : le plaisir de lire Jane Eyre est toujours aussi vif. Comme elle, on veut croire que rien n'est écrit d'avance et que la vie réserve des bonheurs imprévus.

Lorsque j'ai ouvert ce livre, j'étais sur la réserve. En effet, j'ai lu il y a quelques années Les Hauts de Hurlevent, qui ont été ma plus grosse déception littéraire. J'avais donc une certaine appréhension en ouvrant l'oeuvre de sa soeur. Seulement, voilà. J'y ai rencontré un petit brin de fille volontaire, un poil têtue, rêveuse, intelligente, curieuse aussi et qui fait tout pour assurer son bonheur dans la mesure de ses moyens.

Le livre commence dans l'enfance de Jane, qui est élevée dans la maison de ses cousins. Elle est la parente pauvre de la maison, mais elle est surtout mal aimée par sa tante et tyrannisée par son cousin. Très vite, on change d'environnement, car notre petite Jane est envoyée en pension, où elle va vivre d'abord comme pensionnaire, puis comme maîtresse, jusqu'à ces 18 ans.

Dès le début j'ai été charmée par cette petite héroïne qui est très consciente de sa situation, et qui cherche le bonheur malgré le carcan social dans lequel elle est enfermée. Elle sait qu'elle ne peut pas faire un bon mariage car elle n'est ni riche ni jolie ; elle va donc trouver un travail qui lui plait et s'évader dans des rêveries fantastiques pour le reste du temps.
Mais les autres personnages sont aussi très intéressants et apportent beaucoup à l'histoire ; l'autre figure emblématique du livre reste Mr Rochester. Mr Rochester est un complément parfait à notre petite Jane : c'est quelqu'un d'intelligent, qui sait voir au delà des apparences et des comportements sociaux, qui a un goût très sûr sans être pédant ou hautain. Du fait des ses expériences passées, il peut être froid et dur aux premiers abords, mais c'est surtout qu'il est blasé de la société et des aristocrates qui la composent.

Jane Eyre fait partie des classiques romantiques par excellence. Mais c'est une romance très douce et qui sonne juste. On a deux personnages qui ont une vision très claire du monde dans lequel ils vivent et n'espèrent pas plus que ce à quoi ils peuvent prétendre, qui vont se reconnaître et s'apprécier pour ce qu'ils sont, et non pour ce qu'ils possèdent ou paraissent. C'est une romance sans mièvrerie, et les deux héros ne vont jamais tomber dans le superficiel.

Mais ce roman n'est pas seulement une romance, et il traite de plusieurs thèmes qui m'ont surpris par leur présence.

Le premier est l'indépendance de Jane. Dès le début de l'oeuvre, Jane est son propre maître et ne laisse personne entraver son indépendance. Si elle plie sous la loi de quelqu'un ce n'est que pour lui faire plaisir et lui susciter un peu d'amour pour elle. Même dans la pauvreté, elle ne se laisse pas dépendre de quelqu'un. Elle est d'ailleurs bien tourmentée quand Mr Rochester veut la parer comme une poupée et la couvrir de cadeaux chers au moment de la préparation de leur mariage. Elle le vit mal car non seulement elle n'en trouve pas l'utilité, mais en plus elle ressent comme une sorte d'infériorité face à son futur époux. Ce n'est qu'à la fin du roman, quand elle sera matériellement l'égale de Mr Rochester, qu'elle fera tomber toutes les barrières qu'elle a construite et profitera pleinement de son bonheur.

Le deuxième thème est lié au premier : Jane est une héroïne féministe qui pense que les femmes sont tout à fait aussi capables que les hommes. Un passage est particulièrement éloquent p 133 dans mon édition. Je vous en met ici un petit extrait qui en dit long :

"Généralement, on croit les femmes très calmes ; mais elles ont la même sensibilité que les hommes ; tout comme leurs frères ; elles ont besoin d'exercer leurs facultés, il leur faut l'occasion de déployer leur activité. Les femmes souffrent d'une contrainte trop rigide, d'une inertie trop absolue, exactement comme en souffriraient les hommes ; et c'est l'étroitesse d'esprit chez leurs compagnons plus privilégiés que de déclarer qu'elles doivent se borner à faire des puddings, à tricoter des bas, à jouer du piano, à broder des sacs. Il est léger de les blâmer, de les railler, lorsqu'elles cherchent à étendre leur champ d'action ou à s'instruire plus que la coutume ne l'a jugé nécessaire à leur sexe."

C'est suffisamment éloquent, non ?

D'autres thèmes sont évoqués, comme l'absence de futur pour les jeunes filles pauvres, ou la haine portée aux français qui sont jugés frivoles. Et le mélange de tous ces thèmes donne une vision de ce que pouvait être la société aristocratique des campagnes anglaises de l'époque, qu'elle soit riche ou pauvre.

Tout cela est écrit sous une plume fluide et parfois poétique. On sent que l'auteur aime les endroits qu'elle décrit et aime son héroïne. Sa plume est juste, directe et décrit fidèlement les actions et les pensées de son héroïne. Ainsi, il n'y a pas de scènes de floues ou sujettes à interprétation : on comprend ce qu'il se passe et quels sont les sous-entendus et non-dits de la scène. Bon, il y a aussi le fait que je commence à bien connaitre les convenances et les us et coutumes de la société anglaise, donc mon avis est peut être biaisé sur cet aspect là.

En conclusion, Jane Eyre est une oeuvre complexe, profonde, qui parle d'une très belle romance, mais aussi de nombreux thèmes portés par son petit bout d'héroïne. Vous l'avez compris, j'ai aimé Jane Eyre qui m'a surpris par sa force, son indépendance, sa douceur, son bon coeur, sa gentillesse et son pragmatisme. Mais j'ai également aimé son histoire avec Mr Rochester, qui reste un très belle histoire d'amour sans aucune mièvrerie. Une belle oeuvre donc, qui n'a pas perdue son charme à travers le temps.

Ce livre a fait l'objet d'une lecture commune, retrouvez donc leur avis : Gerry - Setsuka - cécile - éléa291 - Trukinette - Clubcinq - 100choses - Chocolatée - Nathalie - Jana - Cacahuète

Ce livre faisait partie de mon Big Challenge Livraddict donc en voilà un de plus !


7 / 10 !

Je sens que je vais y arriver !



7 commentaires:

Cacahuète a dit…

Echaudée comme toi par les hauts de hurlevents, c'était avec grande appréhension que j'ai commencé ce livre, et puis finalement, même si ça n'a pas été un coup de coeur pour moi, ça a été une lecture bien agréable !

Jana a dit…

Comme toi, je garde un mauvais souvenir des hauts de Hurlevent (trop sombre, trop de personnages antipathiques...). Mais pour Jane Eyre, rien de tel : j'ai vraiment adoré ce roman ! Et je partage entièrement ton avis sur les nombreuses thématiques qu'il aborde, outre la très belle histoire d'amour.
Coup de cœur, donc...

Gerry a dit…

un formidable moment de lecture. Ce livre est je pense un incontournable vraiment. Ton avis rejoins le mien. Une héroïne hors du commun et une écrivain tout à fait étonnante

Cécile a dit…

Je vais pas faire originale : j'ai aussi beaucoup aimé. c'est vrai que Jane Eyre est un peu féministe, en tous cas elle ne se croit jamais inférieure aux autres. Un très bon moment pour un livre que j'ai du mal à croire qu'il ait été écrit il y a 2 siècles tant il est moderne...

Nathalie a dit…

Très belle critique, je partage entièrement ! Et merci d'avoir recopier ce passage que je n'ai pas pu retrouver. Il y en a un aussi où elle explique que ce n'est pas parce qu'on a un enfant à sa charge qu'on est obligé de le considérer comme un demi-dieu, je l'ai trouvé excellent également et quelque peu révolutionnaire :D

Evy a dit…

Quasiment un coup de cœur pour moi ! Jane Eyre restera un roman que j'affectionne énormément !

Frankie a dit…

Comme tu le sais, j'ai adoré ce livre et ce personnage que tu décris très bien. Une bien belle lecture !